La République fédérale d’Allemagne, longtemps restée « un pays sans catastrophes », n’était pas vraiment préparée à affronter la pandémie qui a balayé le monde et le continent européen au printemps 2020. La définition de la notion de pandémie peut représenter un « défi » pour les juristes, qui doivent puiser dans l’épidémiologie pour trouver des éléments probants de détermination de cet état sanitaire singulier. Les plans pandémiques allemands sont confectionnés en lien avec les planifications de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Ils n’ont pas de force juridique obligatoire et sont devenus, surtout concernant la majorité des plans des Länder, complètement anachroniques. La Loi fondamentale allemande ne propose pas, dans son arsenal normatif, des dispositions spécifiques permettant de mettre en œuvre un état d’exception adapté à la situation sanitaire résultant de la vague épidémique de coronavirus. Contrairement à la France, l’Allemagne n’a pas de prime abord sombré dans l’inflation normative.
En mars 2020 le Bundestag a établi, conformément à la nouvelle version du paragraphe 5 de la loi sur les maladies infectieuses transmissibles chez l’être humain, « l’état épidémique de portée nationale ». Les dispositions permettant la mise en œuvre de la politique sanitaire sont le paragraphe 28, alinéa 1er, concernant les mesures de protection en cas de détection de personnes malades, contagieuses ou porteuses d’une maladie transmissible et le paragraphe 32 relatif à l’édiction de règlements par les Länder afin de prendre des mesures adaptées.
Le problème principal que pose cette réglementation réside en la confrontation entre deux masses de droits constitutionnellement protégés : les libertés individuelles et collectives doivent être sacrifiées sur l’autel de l’intégrité physique de la population tout en prenant en compte le principe de proportionnalité des mesures prises par les autorités fédérales ou régionales. Cette mise en balance devient d’une difficulté inextricable dans le cas de l’épidémie de coronavirus qui est caractérisée par l’incertitude du risque.
La tâche du juge est plus difficile qu’à l’ordinaire car il doit apprécier les restrictions apportées à l’exercice des droits fondamentaux sans pour autant empiéter sur le champ politique, sans effectuer un contrôle de l’opportunité des décisions prises par les autorités.